Ce matin, mes gars doivent attaquer le démontage de ma Shelby GT500, ce qui ne va pas être facile vu le massacre qu'elle a subit à l'avant. Je pense qu'il vont mettre un sacré paquet de temps pour tout déposer et faire le compte des pièces à garder, celles à reconditionner et celle bonne pour la benne à ferraille sur le parking. Je tiens à ce que l'on garde un maximum de pièces d'origine même si à la fin elle sera bien plus performante que la version qui est passée par les gars de Carroll Shelby en 1967. J'aurais bien mis la main à la pâte pour me changer un peu les idées et toucher à toutes les phases du projet mais j'ai de la paperasse en retard et personne ne la fera à ma place. Il faudrait vraiment que je trouve un gérant pour s'occuper de tout ça à ma place que je puisse me concentrer un peu plus sur la mécanique. J'ai une sainte horreur de l'administratif mais il faut bien le faire.
Arrivé au garage, je passe par les ateliers pour saluer les gars, Kowalski bosse sur un Bagger pour un client, Harry supervise les mécanos de la Hot Rod Factory et du garage et Tom supervise les travaux de carrosserie en enseignant quelques trucs à un apprenti en train de poncer un panneau de carrosserie. Tout roule, on a du boulot pour trois mois, sans compter les urgences, et mes gars ont la pêche, même ceux qui n'ont pas encore pris de vacances. Je m'attarde quelques minutes avec plusieurs employés pour discuter un peu, mais aussi pour retarder le moment ou je poserais mon cul dans mon fauteuil de patron pour m'atteler à régler les questions administratives. A l'accueil, Tina est déjà là, fidèle au poste et toujours souriante et c'est un plaisir de la saluer. Dernier détour avant de m'isoler dans mon bureau, je passe me chercher un café à la sale de pause. Il en reste tout juste assez pour remplir ma tasse, une fois servi, je remets une cafetière à couler et me dirige enfin vers mon calvaire.
Je m'installe dans mon fauteuil et allume mon ordinateur avant de sortir mes clopes et de m'en ficher une au coin des lèvres. Malgré la porte de mon bureau fermé, j'entends encore de loin en loin les bruits de l'atelier qui me parviennent et en fin de matinée, c'est enfin la délivrance. J'ai terminé le dernier dossier que Tina n'a pas pu traiter fautes des autorisations adéquates. Je vais enfin pouvoir toucher à ma Shelby... mais ma satisfaction retombe rapidement lorsque je regarde ma montre puisqu'il est déjà l'heure de la pause de midi. Tant pis, ça attendra cet après midi.
Je rejoins Harry et l'invite au resto pour qu'on discute un peu de ma nouvelle bagnole, je connais ses talents pour tirer le meilleur d'un moteur sans pour autant en faire quelque chose de fragile. Pourtant cet exercice est un compromis difficile à atteindre entre performance et fiabilité mais je n'ai jamais eu de problèmes avec un moteur monté par ses soins. Pendant que nous mangeons, Harry m'expose ce qu'il a en tête pour ma Shelby.
Voila ce que je te propose, Coddy. On va partir sur un 427, pour rester dans la tradition, mais compressé pour la performance. Je la verrais bien posée sur des jantes Shelby 427 en 17", ca permettra de passer du 315 à l'arrière en modifiant la caisse.
Je veux qu'on fasse comme pour ma Charger 500. On garde un max l'esprit d'origine.
C'est pas pour rien que je te propose ça. Pour la carrosserie, on ira taper dans le catalogue Shelby. Par contre, il nous manque un feu de T-Bird pour l'arrière.
Gaffe! Sur les 67, c'est des feux de Cougar.
Merde, t'a raison en plus, Heureusement que j'ai pas encore commencées les commandes de pièces.
Même s'il avait fait cette erreur, je n'aurais pas pu lui en vouloir, il fait du super boulot d'habitude et gère parfaitement l'équipe de mécanos. Il a bien le droit à un joker en cas d'erreur. Nous continuons à discuter de la voiture pendant le repas et au retour au garage, je troque mes fringues contre un bleu de travail pour filer un coup de main pour le démontage. La partie avant est tellement tordue que certaines pièces ne tombent qu'avec l'aide de la torche plasma, du chalumeau ou de la masse. Je sens que le châssis va avoir besoin d'un marbre et qu'on va en chier pour ajuster les pièces de carrosserie. Par contre, la caisse est ultra saine pour une voiture qui n'a pas roulé depuis vingt ans, merci au climat ultra sec du désert de l'Arizona qui a empêché la corrosion de dévorer ce bijou qui m'appartient désormais.
A la fin de la journée, le démontage a bien avancé mais il reste encore de longues semaines de boulot dessus avant que quelqu'un ne puisse faire un tour à son volant. J'espère que Lynn appréciera à sa juste valeur de travailler sur un bijou pareil, c'est une voiture qui a bien plus de valeur que la Camaro de 68 que j'avais prévue pour elle ou même la Mustang que je lui ai offerte. Une Shelby GT500 fait partie des modèles légendaires qui ont fait la gloire des muscle cars et je ne peux pas me résoudre à la laisser pourrir dans une casse.